Santé et démocratie : une idée lumineuse mais un cheminement obscur et des résultats possiblement décevants…

Par Nicole Tortello Duban & Emma Jacquin


Notre point de vue sur le Conseil National de la Refondation (CNR) – Santé


En octobre 2022, Emmanuel Macron et François Braun, ministre de la Santé et de la Prévention, ont lancé le Conseil National de la Refondation (CNR) – Santé, une initiative nationale visant à répondre à quatre défis pour améliorer le système de santé en France

  • permettre à tous l’accès à un médecin traitant
  • garantir une réponse d’urgence de qualité et accessible
  • mobiliser les leviers d’attractivité pour les métiers de la santé
  • accompagner le virage préventif

Plus de 250 réunions ont été organisées à l’échelle nationale et territoriale, impliquant des élus, certains professionnels de santé et… quelques rares citoyens, pour discuter de sujets tels que l’accès à un médecin traitant, l’urgence et les déserts médicaux ; le but étant de trouver des solutions concrètes aux problèmes de santé publique sans « bureaucratiser les concertations ».

Selon le gouvernement, ces réunions ont vu émerger « des centaines de bonnes idées, de projets et de modes de fonctionnement collectifs ». Les résultats des concertations seront présentés début avril 2023.

Bien que le CNR santé ait suscité beaucoup d’espoir et de mobilisation au niveau national et territorial, des syndicats et des élus de l’opposition ont rapidement émis des critiques quant à son efficacité réelle en pointant une simple opération de communication, sans véritable impact sur l’amélioration de notre système de santé.

Ces détracteurs estiment en outre que les conclusions du CNR Santé pourraient être limitées par des contraintes budgétaires ou politiques, et que certaines propositions pourraient ne pas être mises en œuvre après la fin des concertations.

Ils pointent également le fait que, plutôt que de s’attaquer aux raisons profondes des difficultés de l’accès aux soins en France, le CNR santé peut être considéré comme une solution superficielle et temporaire qui ne traite pas les racines du problème.

Le fait que les conclusions des réunions soient encore en attente peut donner l’impression que les avancées concrètes sont encore loin d’être atteintes.

56 % des Français estiment que le CNR Santé ne sera pas un moyen efficace pour trouver de nouvelles solutions.

D’après le sondage Odoxa-Backbone Consulting sur un échantillon de 1 005 français réalisé le 8 septembre 2022.

Bien que le CNR Santé ait été conçu pour inclure la participation citoyenne, il apparaît que sa mise en œuvre ne va pas assez loin dans la prise en compte des besoins et des opinions des citoyens.

Par exemple, le fait que les agences régionales de santé (ARS) aient un rôle majeur dans l’organisation des travaux initiés au plan local a limité drastiquement l’influence des particuliers sur les résultats finaux.

Plus grave, les Français semblent ignorer l’existence de cette instance. À titre d’illustration, en Nouvelle-Aquitaine, plusieurs réunions locales se sont tenues sans la moindre participation citoyenne. De même, des ateliers organisés à Nontron (Dordogne), Bordeaux Cenon (Gironde) et Niort (Deux-Sèvres) ont rassemblé plus de cent participants mais, à l’exception de quelques usagers, peu de citoyens étaient présents.

Il est donc légitime de se demander si le CNR Santé est réellement ouvert à tous et pourquoi certains professionnels de santé n’ont pas été invités aux réunions. C’est notamment le cas des ambulanciers qui sont pourtant les premiers intervenants, y compris dans les déserts médicaux. Cette situation est d’autant plus regrettable que les sentinelles du soin proposent des solutions sur tous les sujets abordés.

Un évident problème de méthode…

Les restitutions régionales ont également mis en exergue un problème de transparence au niveau des données transmises. Certains comptes rendus comprennent des informations chiffrées, tandis que d’autres sont peu précis.

La volonté politique, la réalité du terrain et le flou méthodologique conduisent à émettre quelques interrogations sur les suites de cette initiative, alors que les organisations professionnelles peinent de leur côté à se faire entendre par un ministère débordé par l’ampleur de la crise de notre système de santé et par une Assurance maladie exsangue.

Et si la méthode choisie n’était pas encore la bonne ?


[1] D’après Emmanuel Macron, lors d’une réunion organisée à l’Elysée en compagnie de François Bayrou et Elisabeth Borne sur le Conseil National de la Refondation.

[2] D’après François Braun, ministre de la Santé et de la Prévention, à propos des CNR Santé.

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AleVia • Cabinet de conseil